Les stagiaires sont un accélérateur de modernisation, très appréciés des entreprises

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Interviews

Publié le 19/09/2016

Auteur : Christophe Castro

C’est le progiciel «Yourcegid» qui a été retenu dans le cadre de l’épreuve professionnelle de Contrôle en Cours de Formation dans les établissements publics, ainsi que pour une épreuve ponctuelle proposée aux candidats libres du CNED. Au départ, j’ai formé mes collègues du public à ce progiciel, en tant que formatrice académique. J’ai aussi écrit un livre et élaboré un cours sur ce PGI pour le CNED, qui concerne annuellement environ 250 étudiants de 1ère et 2ème année.

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Interview - Christine Tronquoy est Enseignante en BTS Assistant de Gestion PME-PMI, au lycée Bonaparte à Toulon, au CNED (Centre National d’Enseignement à Distance), et auteur de plusieurs livres pédagogiques chez Nathan.

Pouvez-vous présenter le BTS «assistant de gestion PME-PMI», dans son contexte français et européen ?

Sous le terme PME-PMI, nous faisons référence à des entreprises dont l’effectif est compris entre 5 et 50 salariés. Cette limite posée par le cadre académique correspond aux entreprises dans lesquelles nos étudiants font ensuite leurs stages, et où ils trouvent bien souvent leur premier emploi. Environ 300 étudiants de l’académie de Nice bénéficient cette année de cet enseignement. Ce BTS est aujourd’hui un référentiel commun européen.

Dans ce BTS, une épreuve obligatoire porte sur les PGI (Progiciels de Gestion Intégrés ou ERP ou Systèmes de Gestion Intégrés). C’est le progiciel «Yourcegid» qui a été retenu dans le cadre de l’épreuve professionnelle de Contrôle en Cours de Formation dans les établissements publics, ainsi que pour une épreuve ponctuelle proposée aux candidats libres du CNED. Au départ, j’ai formé mes collègues du public à ce progiciel, en tant que formatrice académique. J’ai aussi écrit un livre et élaboré un cours sur ce PGI pour le CNED, qui concerne annuellement environ 250 étudiants de 1ère et 2ème année.

Qu’est-ce qu’il est important de transmettre autour d’un PGI ?

Il faut bien faire comprendre qu’il s’agit essentiellement d’une base de données unique, exploitée par plusieurs services de l’entreprise. Pour faire intégrer cette dimension de transversalité à mes étudiants, j’ai créé une entreprise fictive, autour de laquelle je les fais travailler en petits groupes : DRH, comptables, acheteurs, commerciaux… En changeant successivement de rôle, ils peuvent appréhender, depuis chaque point de vue, les effets de leurs actions sur la base de données centralisée. Pour les étudiants, cette transversalité des PGI est une source d’étonnement et de découvertes.

Au passage, ils mesurent aussi l’importance de la confidentialité des informations à travers la gestion des droits d’accès aux données qui varient d’un utilisateur et d’un service à l’autre. De leur côté, les entreprises me confirment qu’elles apprécient que les stagiaires ou nouvelles recrues soient désormais bien sensibilisés à ces notions de confidentialité et de droits d’accès.

Les connaissances acquises autour d’un pgi sont-elles exploitables dans les PME-PMI ?

Il faut d’abord souligner que beaucoup de petites entreprises accusent un retard technologique parfois important. Paradoxalement nos stagiaires, qui sont censés venir se former, peuvent y jouer un rôle évangélisateur.

Dans ce contexte, certains étudiants nous demandent à quoi vont leur servir les connaissances acquises sur les PGI, alors que ces outils numériques ne sont pas encore massivement introduits dans les PME-PMI. Il est vrai que ces dernières sont encore nombreuses à se cantonner à l’utilisation de petits logiciels de gestion commerciale ou de comptabilité…

Je réponds à mes étudiants que d’une part, les PME-PMI filiales ou succursales de grandes entreprises en utilisent et que d’autre part, ces connaissances seront requises à terme dans les PME-PMI. L’adoption de ces progiciels semble en effet inéluctable.

Autre argument, les PGI sont des outils structurants, que les étudiants seront amenés à exploiter un jour ou l’autre dans une entreprise de taille plus importante. En les étudiant en BTS, ils pourront acquérir les dispositions d’esprit et les principaux modes opératoires permettant de les exploiter.

Quels retours avez-vous de la part des entreprises ?

Dans le cadre du stage en entreprise de 6 semaines, je vais voir chaque étudiant sur place à plusieurs reprises. A cette occasion, je demande aux entreprises de nous transmettre des documents «anonymisés», afin d’alimenter notre PGI avec des cas réels. Je constate qu’il y a quelques années, les entreprises se plaignaient de la faible implication et d’un certain manque d’autonomie des étudiants, tandis qu’aujourd’hui, elles les trouvent plus dynamiques et entreprenants.

De plus, quand nos étudiants arrivent en entreprise, ils partagent souvent leurs connaissances avec une certaine catégorie de salariés, plus tournée vers l’innovation. C’est notamment le cas à propos d’Excel, que nos étudiants maîtrisent particulièrement bien. Dans cette veine, ils parlent aussi des PGI, que les PME-PMI connaissent peu, et s’en font les ambassadeurs. Les entreprises étant plus ou moins engagées dans leur transformation numérique, les stagiaires constituent un accélérateur de modernisation très apprécié.

En tant que formatrice académique, avez-vous constaté une évolution dans la perception de ces outils ?

Je dirais que l’introduction des PGI, il y a environ 6 ans, a été une grande révolution. Il est vrai qu’il y a un véritable fossé entre les petits progiciels spécialisés et les PGI, dont la logique est celle d’une grosse base de données. Au début, il y avait beaucoup de réticences de la part de mes collègues enseignants, je recevais beaucoup de questions en raison de la grande richesse fonctionnelle de ces progiciels. Mais aujourd’hui, dans notre académie, tout le monde s’y est mis et a acquis une grande autonomie.

Et en tant qu’enseignante, avez-vous adopté un changement de posture ?

Pour moi, les cours magistraux traditionnels n’existent plus ! Il faut même renoncer à en donner : cela ne sert à rien dans ce type de formation. Par contre, les classes en groupes et en mode projet fonctionnent parfaitement bien, leur but étant de co-construire le cours avec les étudiants, à partir d’un cas d’entreprise.

Par ailleurs, je «m’auto-forme» actuellement sur Moodle, une plate-forme de formation en ligne, après avoir longuement utilisé la plateforme collaborative Claroline.

Les 4 conseils de Christine Tronquoy

  • Sensibilisez vos étudiants à la mission d’évangélisation qu’ils peuvent avoir dans des entreprises de petite taille non encore tournées vers le numérique.
  • Proposez a vos étudiants de construire ensemble des modes opératoires sur PGI, pour développer leur autonomie face à ces outils numériques.
  • Amenez toujours vos étudiants a prendre de la distance et à analyser objectivement ce qu’ils ont réalisé.
  • N’hésitez pas à adopter vous-même un rôle pendant un jeu de rôle : vos élèves seront très attentifs et émettront des critiques pertinentes.