Il y a un fort enjeu à savoir créer des usages pédagogiques

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Interviews

Publié le 21/09/2016

Interview - Jean-Michel Perrenot, Délégué Régional du Groupe IGS à Lyon, et Martine Roblin Directrice Pédagogique au Pôle Alternance Apprentissage, Directrice du Département TICE au Groupe IGS

Jean-Michel Perrenot

Comment le numérique s’intègre-t-il aujourd’hui dans les enseignements de gestion ?

J.M. Perrenot : J’exerce dans les métiers de l’enseignement depuis près de 36 ans et j’ai pu observer que l’intégration du numérique a été progressive. Nous avons d’abord connu un tâtonnement sur les technologies, où nous étions obnubilés par les outils, difficiles à construire et à faire évoluer.

Désormais les outils ne sont plus un problème et on en trouve suffisamment. Pour un directeur d’établissement, le défi s’est déplacé sur les ressources humaines : comment faire évoluer les enseignants et formateurs pour qu’ils adaptent leur manière d’enseigner à ces outils, lesquels imposent une refonte pédagogique complète et non une simple intégration.

M. Roblin : Les outils ne sont effectivement plus un problème… sous réserve de bien savoir s’en servir. Il y a un fort enjeu à savoir créer des usages pédagogiques autour de ces outils, et à faire que ces usages soient utiles professionnellement. Car la technologie est omniprésente : PC, tablettes, plateformes collaboratives d’e-learning et de gestion de contenu, réseaux sociaux, tableaux blancs numériques, etc. Pour l’enseignant, cela constitue un champ d’investigation très vaste, pour mieux former et mieux se former.

Martine Roblin
Martine Roblin

En quoi consiste le learning lab et quels en sont les principaux objectifs ?

J.M. Perrenot : Ouvert en avril 2014, ce dispositif porté par un concept réunit les responsables pédagogiques, les enseignants, les apprenants, les entreprises partenaires, dans le but principal de développer l’innovation et l’expérimentation pédagogiques afin de s’adapter au renouvellement permanent des outils et des usages. Nous disposons dans le Learning Lab d’équipements utiles et très stimulants (tableaux blancs numériques, vidéoprojecteurs intelligents, murs de créativité, mobilier modulaire), pour travailler de manière collaborative en présentiel connecté.

Le Learning Lab peut à la fois être considéré comme un démonstrateur des outils, des pédagogies collaboratives et des expertises numériques les mieux adaptés aux besoins spécifiques des étudiants et des entreprises, et comme un outil de co-création de contenus.

M. Roblin : Le Learning Lab capitalise plus de 12 ans d’expérience collective du Groupe IGS dans le domaine de la pédagogie numérique. Il fait suite au développement d’un centre de ressources multimédia, de plateformes Ecampus et de e-learning, Nous avons développé une formation-action de formateurs à la pédagogie numérique que nous dispensons depuis plus de 3 ans. Elle permet d’acquérir des compétences digitales et de se ressourcer pour créer des scénarios pédagogiques innovants. Ces compétences sont identifiées et valorisées notamment dans un référentiel et dans une certification.

Comment répondez-vous à l’attente d’employabilité des entreprises et des étudiants ?

J.M. Perrenot : Cette employabilité repose sur la capacité à exploiter instantanément les outils numériques de l’entreprise. Au-delà de cet objectif, il nous semble essentiel de développer la curiosité et l’appétit de connaissances des étudiants, pour être en mesure de s’adapter aux prochaines vagues d’outils et de pratiques qui ne manqueront pas de se succéder. L’employabilité ne doit pas être opportuniste ni se réduire au court terme. Il ne suffit pas d’être curieux : il faut le rester.

M. Roblin : Pour donner à la notion d’employabilité un aspect concret, nous conseillons de lister les compétences à réunir pour un poste ou un emploi. Nos actions pédagogiques mettent en regard ces compétences. Par ailleurs, avec nos étudiants, nous mettons en place des portefeuilles individuels de compétences, sous forme d’un portfolio. Il leur permet notamment d’apporter en un clic la preuve de ce qu’ils ont appris ou développé, dans tel établissement ou entreprise – sans perdre de vue les contraintes liées à la notion d’identité numérique. Toutes les compétences numériques sont clairement identifiables, ce qui constitue un atout pour l’employabilité.

J.M. Perrenot : Dans le cadre des partenariats que nous avons par exemple avec Cegid, nos apprenants travaillent sur des logiciels professionnalisants, notamment dans les domaines de la paie et de la comptabilité. Nos formateurs ont par ailleurs développé des supports pédagogiques pour ces outils, parfois en relation avec d’autres outils. Il en est de même avec d’autres éditeurs. Pour IGS, qui a dans son ADN la notion d’adaptation aux besoins réels de ses clients finaux, les entreprises, il est naturel d’en utiliser les principaux outils.

M. Roblin : L’idée n’est pas de rendre les étudiants prisonniers d’un outil logiciel, mais au contraire de leur donner des compétences suffisamment génériques, une bonne faculté d’adaptation.

Quelles caractéristiques donnez-vous aux contenus pédagogiques que vous élaborez ?

J.M. Perrenot : Nous ne croyons pas que la simple mise en contact avec les outils soit suffisante, presque de façon magique. Cela nécessite un travail pédagogique patient, ambitieux et collectif. Au-delà de la simple maîtrise des outils et des process, nous essayons de mobiliser et de stimuler la créativité et l’esprit d’innovation.

M. Roblin : Nous faisons aussi en sorte d’entendre les préoccupations des entreprises autour des outils. Cela nous permet de créer avec elles ou pour elles, et souvent avec l’éditeur, des scénarios réalistes et bien adaptés.

Les 3 conseils de Jean-Michel Perrenot et Martine Roblin

  • Ne jamais hésiter à remettre complètement en cause une pratique, un support, des outils, même pour transmettre des concepts fondamentaux, considérés comme quasi immuables. La formation tout au long de sa vie s’applique d’abord à soi.
  • Partager, échanger, se mettre en réseau pour échanger les expériences et les bonnes pratiques, les cas d’entreprises les plus réalistes et informatifs.
  • Échanger régulièrement avec les entreprises est essentiel : une visite d’entreprise peut et doit concerner également les enseignants, dans une dynamique d’accompagnement des apprenants et pour établir des échanges avec leurs responsables en entreprise.